Qui était Hypatie d'Alexandrie

Qui est Hypatie d'Alexandrie ?

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Hypatie est une des premières femmes philosophes, astronome et mathématicienne dont l’histoire nous est parvenue.

À une époque où les activités philosophiques et scientifiques ne laissaient que peu de place à la femme, Hypatie s’est distingué par la renommée dont elle jouissait de son vivant et après sa mort.

En tant que philosophe, Hypatie jouissait d’une très grande réputation et de nombreux fils de la haute société se pressait pour assister à ses enseignements de la doctrine néoplatonicienne, mais également pour ces cours de mathématiques et d’astronomie qu’elle offrait aussi bien en privée qu’en public.

La vie d’Hypatie

Hypatie serait née à Alexandrie entre 350 et 370 après J-C. et est morte assassinée en 415 de notre ère.

Elle était la fille du savant alexandrin Théon. C’est lui qui enseigna à sa fille l’astronomie et les mathématiques.

Hypatie et son père Théon d'Alexandrie

Hypatie était une philosophe néoplatonicienne. Le néoplatonisme était un courant de pensée développée à Alexandrie et une doctrine philosophique très répandue à l’époque d’Hypatie.

Il s’agissait d’une doctrine s’appuyant sur la philosophie développée par Platon plusieurs siècles auparavant, mais qui a incorporé au fil des générations diverses thèses issues de multiples courants de pensée.

Hypatie n’a jamais eu d’époux connu. Elle serait restée vierge toute sa vie et aurait consacré son existence à ses recherches.

Les travaux et découvertes d’Hypatie

Très peu de choses sont connues sur les travaux réalisés par Hypatie. Néanmoins les historiens estiment qu’elle contribua à de nombreuses publications de commentaires scientifiques et réédition de textes philosophiques et scientifiques.

Comme les moines copistes le feront plus tard durant le moyen-âge, les savants de l’Antiquité contribuaient à préserver les textes anciens en les recopiant et en ajoutant des commentaires qui enrichissaient le texte et la réflexion.

Dans le commentaire du livre d’astronomie l’Almageste de Claude Ptolémée, rédigé par son père on y trouve la mention du type de contribution laissé par Théon et sa fille : « Commentaire de Théon d'Alexandrie sur le Livre III de l'Almageste de Ptolémée, édition révisée par ma fille Hypatie, la philosophe ».

L'édition du 5e siècle du troisième livre de l’Almageste de Ptolémée aurait même été entièrement rédigée par Hypatie. C’est d’ailleurs dans cet ouvrage que sont consignées les explications du modèle géocentrique de l’univers qui demeurera la norme jusqu’au 16e siècle.

Modèle géocentrique

Pour rappel, le modèle géocentrique affirme que le Soleil et les planètes tournent tous autour de la Terre. On sait désormais depuis les observations de Galilée et de Copernic que cela n’est pas le cas.

Hypatie semble également avoir largement contribué à l’éducation par l’enseignement qu’elle dispensait auprès des jeunes de la cité.

Enseignement d'Hypatie

L’un de ses disciples, un dénommé Synésios, est par la suite devenu évêque. Des passages mentionnant Hypatie ont été découverts dans ses lettres personnelles. Notamment un passage où il est fait mention d’une leçon donnée par Hypatie et portant sur les techniques de fabrication de l’astrolabe, un instrument servant à mesurer la hauteur du Soleil et des étoiles dans le ciel.

Malheureusement, aucun travail ou théorie développée par Hypatie n’est parvenue jusqu’à nous.

Est-il possible qu’en tant que femme elle ne pouvait signer de texte scientifique en son nom? Cela est possible, mais c’est difficile à affirmer avec certitude.

Mais, il est vrai qu’elle vécut à Alexandrie à une époque troublée ou les mœurs considéraient d’un mauvais œil une femme philosophe qui enseigne à des hommes en pleine place publique.

C’est également une époque où l’influence de l’Église chrétienne était croissante et jugeait que l’enseignement n’était pas l’affaire des femmes, encore moins d’une femme considérée comme païenne.

Alexandrie à la fin de l’Antiquité

Alexandrie antiquité

La ville d’Alexandrie était un des grands centres économiques et intellectuels du monde antique. L’Égypte était l’une des régions les plus riches et les plus prospères de la Méditerranée.

Depuis la conquête de l’Égypte par Alexandre le Grand, au 4 siècle av. J.-C., le pays avait été intégré dans le monde grec. De nombreux savants comme l’astronome Claude Ptolémée y avaient vécu.

C’est également à Alexandrie que l’on retrouvait la célèbre bibliothèque d’Alexandrie, la plus grande bibliothèque du monde antique.

Malgré l’incendie qui survint lors de la conquête de la ville par Jules César, en 48 apr. J.-C., elle est demeurée le refuge de milliers de textes scientifiques et philosophiques.

Mais l’Alexandrie d’Hypatie était également une ville en proie aux troubles religieux entre chrétiens et adeptes des autres religions.

Vers les années 320, sous le règne de l’empereur Constantin, l’Empire romain au sein duquel l’Égypte était une province importante, avait adopté le christianisme comme religion officielle de l’État,

Hypatie avait donc vu le jour à une époque en transition où la présence des différentes religions commençait à poser problème à Alexandrie.

La mort d’Hypatie

Comment est morte Hypatie

Hypatie et son père Théon n’avaient jamais adopté le christianisme. Ils étaient donc devenus une cible dans une période propice aux conflits interreligieux.

De plus en plus d’émeutes éclataient à Alexandrie. Des conflits politiques pour le contrôle de la ville opposaient le préfet Oreste, un ami et disciple d’Hypatie, à l’évêque Cyrille.

L’historien Socrate le Scholastique nous a laissé un récit de la mort d’Hypatie.

Des moines zélés avaient tenté de s’en prendre au préfet Oreste et de l’assassiner. Mais la population serait intervenue et aurait sauvé le représentant de l’empereur.

Des rumeurs circulaient qu’Hypatie dissuadait Oreste de se réconcilier avec l’évêque Cyrille. En tant que philosophe néoplatonicienne elle était donc accusée de semer la discorde entre deux fervents chrétiens. Il n’en fallait pas plus pour lui attirer des problèmes.

Un jour, alors qu’elle rentrait chez elle, une bande d’émeutiers zélés lui aurait tendu une embuscade.

Elle aurait été trainée dans l’Église Kaisareion où on l’aurait mise à mort. Son corps aurait ensuite été démembré puis brulé.

Voici un extrait du livre de Socrate le Scholastique rédigé vers 440, soit très peu d’années après la mort d’Hypatie. On y apprend l’influence qu’avait Hypatie. Ce qui laisse penser qu’elle représentait un danger pour l’influence de l’Église d’Alexandrie.

« Il y avait dans Alexandrie une femme nommée Hypatie, fille du Philosophe Théon, qui avait fait un si grand progrès dans les sciences qu'elle surpassait tous les Philosophes de son temps, et enseignait dans l'école de Platon et de Plotin, un nombre presque infini de personnes, qui accouraient en foule pour l'écouter.

La réputation que sa capacité lui avait acquise lui donnait la liberté de paraître souvent devant les Juges, ce qu'elle faisait toujours, sans perdre la pudeur, ni la modestie, qui lui attiraient le respect de tout le monde.

Sa vertu, tout élevée qu'elle était, ne se trouva pas au-dessus de l'envie. Mais parce qu'elle avait amitié particulière avec Oreste, elle fut accusée d'empêcher qu'il ne se réconciliât avec Cyrille. Quelques personnes transportées d'un zèle trop ardent, qui avaient pour chef un Lecteur nommé Pierre, l'attendirent un jour dans les rues, et l'ayant tirée de sa chaise, la menèrent à l'église nommée kaisareion, la dépouillèrent, et la tuèrent à coups de pots cassés.

Après cela, ils hachèrent son corps en pièces, et les brûlèrent dans un lieu appelé Cinaron. Une exécution aussi inhumaine que celle-là couvrit d'infamie non seulement Cyrille, mais toute l'Église d'Alexandrie, étant certain qu'il n'y a rien si éloigné de l'esprit du Christianisme que le meurtre et les combats. Cela arriva au mois de mars durant le carême, en la quatrième année du Pontificat de Cyrille, sous le dixième Consulat d'Honorius, et le sixième de Théodose. »

L’héritage d’Hypatie

Malgré sa mort tragique, sa mémoire ne s’est jamais complètement effacée. Des mentions éparses apparaissent ici et là au cours du Moyen-Âge.

Mais c’est au cours de l’époque moderne que les mentions d’Hypatie comme une figure de sagesse et de tolérance vont apparaitre et devenir plus fréquentes.

Ce n’est sans doute pas un hasard si l’époque moderne coïncide avec une popularité croissante de la figure d’Hypatie.

Peinture Rafael Hypatie

La période qui débute vers la fin du 15e siècle avec la fin du Moyen-Âge connait un développement croissant des sciences et une remise en cause du pouvoir de l’Église.

Des auteurs comme Voltaire par exemple voient dans la fin tragique d’Hypatie un exemple de plus des excès de zèle religieux qui s’abattaient autrefois sur les hommes et femmes de sciences.

Hypatie est aujourd’hui considérée comme une icône du féminisme et une martyre de la philosophie.

Elle a été une savante et une philosophe a une époque où ces activités n’étaient pas ouvertes aux femmes. Malgré sa fin tragique et le peu de traces qu’elle a laissées dans l’histoire, elle est la seule femme de science ayant vécu à l’Antiquité connue à ce jour.

En astronomie, un astéroïde découvert en 1884 porte son nom. Un cratère lunaire a également été baptisé Hypatia en son honneur.

L’exoplanète Iota Draconis b, découverte en janvier 2002, est également nommée Hypatie en hommage à l’astronome et philosophe d’Alexandrie.

En 2010, le film Agora raconte l’histoire d’Hypatie et de ses travaux scientifiques. Le film met d’ailleurs une emphase toute particulière sur ces travaux en astronomie. Dans le long métrage, Hypatie est présentée défendant la thèse héliocentrique de l’univers, autrement dit la thèse voulant que les planètes tournent autour du Soleil.

En revanche, comme nous l’avons vu plus haut, elle semble plutôt avoir adhéré à la théorie géocentrique. Il semble plutôt certain qu’elle croyait, comme la plupart des savants de son époque, que la Terre était au centre de l’Univers. Cette croyance était devenue la thèse la plus partagée dans le monde méditerranéen depuis que le célèbre astronome Claude Ptolémée l’a décrite dans son Almageste.


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